Quand je nourrissais mon
Fils, je Le voyais être si
beau que ceux qui Le regardaient
étaient soulagés de leurs
douleurs et consolés en leur tristesse.
Jamais la moindre souillure,
jamais la moindre tache, de
sa divine Personne.
J'étais en continuelle oraison,
rarement vue et sortant très rarement
; je m'humiliais aux plus
petites oeuvres... Je fus discrète
aux jeûnes, selon que ma nature
le pouvait supporter.
Joseph me servait fidèlement,
et jamais de sa bouche on n'entendait
une parole de cajolerie,
de murmure ou de courroux.
Nous nous contentions de peu et
nous donnions ce que nous
avions de superflu aux pauvres.
Joseph était soigneux en son
labeur, doux à ceux qu'il reprenait,
très fidèle témoin des merveilles
de Dieu. Il était tellement
mort au monde qu'il ne désirait
que les choses célestes.
Il se rendait rarement aux assemblées
des hommes et à leurs
conseils, car tout son désir fut
d'obéir aux volontés divines ;
c'est pourquoi sa gloire est maintenant
grande.
Mon Fils Jésus travaillait de
ses mains, et quand Joseph lui
disait quelquefois, sans y penser
: ‟Faites ceci ou cela”, il le
faisait, et de la sorte, il cachait la
puissance de la Divinité que Joseph
et moi étions seuls à connaître.
Il nous parlait, nous disait des
paroles de consolation, des discours
de Dieu, en sorte qu'il nous
comblait de joies indicibles.
Nous L'avons vu souvent entouré
d'une lumière admirable, et
entendions les concerts des Anges
qui chantaient sur Lui.
Je savais ce qui était écrit de
mon Fils, et mon coeur était rempli
de tristesse et d'amertume.
J'étais un jour plongée dans la
douleur et dans la considération
de sa Passion. Il me dit : ‟Ne
croyez-vous pas, ma Mère, que
Je suis en mon Père, et que mon
Père est en Moi ? Pourquoi vous
affligez-vous ?...
La Volonté de mon Père veut
que Je souffre la mort, et ma Volonté
est celle de mon Père. La
Chair que J'ai reçue de vous doit
souffrir, afin que la chair des autres
soit rachetée et que l'âme
soit sauvée.”
J'ai vécu longtemps après
l'Ascension de mon Fils, et Dieu
l'a voulu afin que les âmes fussent
converties à Lui, les Apôtres
et les Élus affermis en voyant ma
patience invincible et le règlement
de ma vie.
Tout le temps que j'ai vécu,
j'ai visité les endroits où mon Fils
a souffert et où Il a manifesté ses
Merveilles ; aussi sa Passion
était empreinte dans mon coeur.
Mes sens étaient retirés de ce
qui est du monde, et j'étais incessamment
enflammée de saints
désirs et exercée par des douleurs.
Ô ma fille ! Souvenez-vous
toujours de la Passion très
amère et de la mort horrible de
mon très cher Fils !
Souvenez-vous des Plaies de
ses Pieds et de ses Mains ! Par
ces os si durs, les clous sont entrés
! Quelle peine cruelle Il a
soufferte, mû à cela par les ardeurs
des divines Amours dont Il
brûlait pour les âmes.
Pensez aussi quelle était ma
douleur ! Nul homme ne la peut
comprendre. Tous ceux qui
étaient dans le sein d'Abraham
eussent mieux aimé être en enfer
que de voir une si épouvantable
peine en leur Seigneur... Et moi,
sa Mère, j'étais debout devant
Lui !...
Ah ! désirez maintenant, ma
fille, endurer toute sorte d'adversités
plutôt qu'être séparée de
Dieu en jouissant de tous les
plaisirs. Fuyez l'inconstance du
monde qui n'est qu'une vue passagère,
une vision vaine, une
fleur qui se fane et se flétrit soudain.
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"Ah, si les hommes savaient ce qu'est l'Éternité,
ils feraient tout pour changer de vie !"
Sainte Jacinthe de Fatima